La Renaissance, au coeur de la pensée Précolombienne
« Notre Seigneur l’Ecorché », Xipe Totec dans la langue Nahuatl, était l’un des Dieux Primordiaux des Civilisations
Mésoaméricaines (Ouest, Centre et Golfe du Mexique).
Les premières représentations apparurent à Xolalpan, près de Teotihucan, ainsi qu'à Texcoco, en lien avec la culture
de Mazapán, c'est-à-dire durant la phase Toltèque postclassique (IXe-XIIe siècle).Il fut adopté par les Aztèques
sous le règne d'Axayacatl (1469-1481), jusqu’à la phase ultime de cette civilisation, au moment de la Conquête des
Conquistadors espagnols. Dans le Mythe de la Création Aztèque : il était l’un des 4 Dieux Principaux, représentant
l’un des points cardinaux et dirigeait l’Est.
Dieu du Printemps et ordonnateur de la nature, Xipe Totec était associé à la fertilité, à la régénération des cycles
agricoles et à la guerre. Il était aussi le patron des Orfèvres.
Personnifiant le cycle de la nature et de la renaissance avec le retour de la germination, il était revêtu de la peau
d’une victime humaine sacrifiée, symbole de la végétation nouvelle qui recouvrait la Terre au printemps.
À l'approche de cette saison, au cours du mois de tlacaxipehualiztli (écorchage des hommes), le deuxième du
calendrier rituel aztèque, les prêtres mettaient à mort des victimes humaines en leur arrachant le cœur. Ils écorchaient
ensuite les corps et revêtaient ces peaux, qu'ils teignaient en jaune et qu'ils appelaient teocuitlaquemitl (vêtements d'or).
Ce festival de la semainson du maïs était une des fêtes les plus importantes à l'époque .
Elle était communément célébrée sur deux autels circulaires : l'un pour sacrifier les captifs à travers des combats
de gladiateurs ou de flèches, et l'autre pour le dépeçage à la gloire de Xipe Totec. Les prêtres étaient vêtus de la peau
des sacrifiés, qui était ensuite déposée dans de petites cavités.
Faite dans un basalte d’origine volcanique, notre sculpture intègre
toutes les caractéristiques et attributs du Dieu, chez les Aztèques.
Il est représenté sous les traits d’un personnage masculin debout
sur un petit socle, jambes écartées, et à la position hiératique et
austère. La tête est couverte de la peau du sacrifié, et les ouvertures
de la bouche et desyeux laissent entrevoir le visage du prêtre
officiant ou du Dieu personnifié. L’arrière de la tête est gravé
d’un lien de maintien formant avec la peau sacrificielle un
masque sacré. Le haut du crane est creusé, faisant office de
réceptacle pour recevoir des offrandes. Le nez est percé d’un
labret, nous renvoyant aux origines Toltèques de Tula, de Xipe Totec.
Les oreilles arborent de grosses boucles, signes de noblesse
et de puissance.
Le buste est lui aussi recouvert de la peau du sacrifié. Une couture sur le torse nous montre comment était appareillé
ce costume sanglant, tandis que le dos, encore plus explicite, nous révèle deux gros nœuds fait de liens finement représentés.
Le Bras droit est levé, la main creusée afin de porter l’attribut du Dieu, chicahuaztli. Ce sceptre, probablement en matière
périssable comme du bois, symbolisait la fertilité de la terre.
Le bras gauche devait également être en bois et a aujourd’hui disparu, laissant apparaître la main pendante du sacrifié
qui restait attachée à la peau pendant tout le rituel de 20 jours. Les contours du costume sont bien délimités, que ce soit
au niveau du cou qu’au niveau des jambes de la statue. Il est d’ailleurs mis en valeur par l’application d’un pigment
rouge sur la véritable peau du personnage.
Une ceinture enserre le bas du ventre et retient un bandeau à motifs d’écailles qui révèlent l’envers de la peau du sacrifié.
C’est une caractéristique de l’art aztèque pour représenter la peau en décomposition et la symbolique de la renaissance
comme la mue d’un serpent.
Le trou au niveau du plexus solaire, selon certaines recherches de l’INAH, permettait de rendre vie à la Statue
et au Dieu, via l’introduction d’une pierre verte, pendant certaines cérémonies.
La découverte du premier temple dédié à Xipe Totec a été annoncée le 3 janvier 2019. Ce site archéologique situé dans
l’état de Puebla, à Ndachjian-Tehuacán, daterait du début du XIe siècle et aurait perduré jusqu’au XIIIe siècle.
Une importante sculpture du Dieu a été retrouvée, permettant de souligner l’importance du culte de Xipe Totec à
cette époque.
Si la représentation du dieu est bien connue au travers des statues de terre cuite, ou bien encore de son iconographie dans
les Codex, plus rares sont les statues de pierre nous étant parvenues à ce jour.
Notre sculpture est à rapprocher de deux œuvres connues : un bel exemplaire conservé au National Museum of the
American Indian, à Washington, et un au Museum für Volkerkunde, à Bâle, où le dieu est représenté est assis en tailleur.